Dispensation des médicaments aux patients en situation de précarité

Assurer un accès aux soins pour tous, quel que soit le statut social : cela est inscrit dans l’ADN même des établissements publics de santé. Les Permanences d’Accès aux Soins de Santé (PASS) ont été créées dans ce but en 1998 et accueillent des personnes en situation de précarité, exclues du système de santé commun. A l’AP-HM, l’équipe pluridisciplinaire de la PASS Rimbaud [3] est composée de quatre médecins, d’une infirmière et d’une assistante sociale afin d’offrir non seulement une expertise médicale aux patients, mais aussi un accompagnement dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits, notamment en matière de couverture sociale. Les agents peuvent, le cas échéant, recourir à un service d’interprétariat grâce à un partenariat entre l’AP-HM et l’association ISM.

Afin de compléter ce panel, une permanence pharmaceutique a été ouverte au sein même de la PASS Rimbaud à l’Hôpital de la Timone. Cette configuration permet d’optimiser traitements et suivi en facilitant la dispensation des médicaments aux patients n’ayant pas accès aux pharmacies d’officines de ville (dans le cas d’absence de couverture sociale complète ou d’extrême précarité par exemple). En plus des patients suivis par la PASS, la prestation est ouverte aux personnes sortant d’hospitalisation ou venant en consultation externe spécialisée.

 Mais dans un tel contexte, le rôle du pharmacien va bien au-delà d’une simple délivrance de médicaments sous prescription. Lorsque le Dr Clémence TABÉLÉ, référente du dispositif, énonce les différentes missions accomplies on saisit immédiatement l’étendue des bénéfices pour le patient :

« Notre rôle est d’informer sur les posologies, les traitements, en proposant aux patients un plan de prise adapté. Nous procédons également, lorsque cela est nécessaire, à des optimisations thérapeutiques. Si un médicament doit être conservé au frais par exemple, mais que le patient n’a pas accès à un frigidaire, nous cherchons des alternatives avec les médecins afin de proposer un traitement de substitution.

Au cours des entretiens individuels, nous faisons aussi de la prévention et de l’éducation thérapeutique. Nous avons notamment beaucoup de patients diabétiques sous insuline. Un partenariat avec un laboratoire nous permet de leur prêter des lecteurs de glycémie le temps qu’ils obtiennent leurs droits. »

Le fait d’être au cœur même du service, de pouvoir collaborer avec les médecins, de participer aux réunions pour aborder le cas de certains patients, tout cela permet de considérer chacun dans sa globalité : la permanence pharmaceutique identifie les cas de polypathologies, fait le lien entre les différentes spécialités et s’assure de la bonne observance des traitements. Des ordonnances visuelles avec un plan de prise imagé sont utilisées lorsque la personne n’est pas en mesure de lire les recommandations.
 

En outre, une vérification systématique des droits du patient est effectuée. Certains y ont accès sans le savoir. Cela participe à une réduction des dépenses pharmaceutiques au niveau de l’institution, tout comme la facturation rétroactive pour les médicaments rétrocédables ou la déprescription de certains traitements potentiellement inadaptés.

Un projet de recherche multicentrique randomisé (PREPS) a été lancé pour évaluer l’impact des PASS pluridisciplinaires sur le taux de réhospitalisations des patients précaires sortant d’hospitalisation. Il sera mené sur 3 ans et concerne 5 établissements hospitaliers sur le territoire national, dont la PASS Rimbaud à l’AP-HM, qui en est le promoteur :

« Nous souhaitons que les résultats de l’étude donnent lieu à des modifications dans le financement des PASS. Les moyens alloués n’ont pas évolué depuis la circulaire DGOS sur le fonctionnement des PASS de 2013. Or les besoins n’étaient pas les mêmes à l’époque. En 2013 la PASS Rimbaud accueillait 2 à 3 patients par jour. Ces chiffres ont depuis été multipliés par 10. Les délais de traitement par l’assurance maladie sont également plus longs aujourd’hui, impliquant une durée de prise en charge hospitalière plus étendue. », explique le Dr TABÉLÉ.   

Les PASS jouent ainsi un rôle vital dans la lutte contre la précarité et l’exclusion, avec des équipes attentives à apporter les solutions les plus adaptées à la situation et aux besoins de chacun.