Greffe massive de cartilage : une première française à l’AP-HM
C’est une infirmière d’une cinquantaine d’années, très active. Son quotidien bascule totalement suite à une randonnée où elle se tord le genou. L’attache osseuse de son ménisque se détache en arrière du tibia (désinsertion de racine méniscale), ce qui a pour effet immédiat un contact prématuré entre le cartilage du fémur et le cartilage du tibia. Pour soulager son genou douloureux et gonflé, des infiltrations de corticoïdes lui sont prescrites mais cela entraîne malheureusement une aggravation de l’ostéo-nécrose induite par le frottement anormal. Elle ne peut bientôt plus du tout marcher.
C’est dans cet état avancé de la pathologie qu’elle est reçue par l’équipe de l’Institut du Mouvement et de l’appareil Locomoteur (IML) de l’Hôpital Sainte-Marguerite. Afin que leur patiente retrouve sa mobilité, le Pr Mathieu OLLIVIER et le Dr FABRE-AUPRESPY vont lui greffer une prothèse partielle de genou réalisée à partir du cartilage frais d’un donneur décédé. Une première en France, rendue possible grâce à une collaboration unique entre l’AP-HM, l’Établissement Français du Sang et la société Arthrex.
« Lorsque le cartilage disparaît nos os se touchent, des douleurs surviennent et la fonction articulaire est contrariée. Pour reprendre une image couramment utilisée, c’est exactement comme s’il n’y avait plus de pneu entre la jante et la route. Or, ce qui rend le cartilage si précieux pour nous, c’est que contrairement à d’autres tissus il ne peut pas se régénérer. » (Pr OLLIVIER)
Le cartilage est en effet constitué à 99% d’eau et de collagène, il ne comporte ni cellules ni vaisseaux et ne peut donc pas cicatriser ou repousser. Pour traiter ce type de pathologies la seule option est le remplacement : soit par des tissus synthétiques (membranes collagéniques), soit par des tissus prélevés chez des donneurs d’organes et cryocongelés à -180° dans de la vapeur d’azote. En plus d’être beaucoup moins onéreuses, les greffes de cartilage frais issues de donneurs présentent l’avantage de fonctionner immédiatement en étant recolonisées par les cellules du receveur. Elles ne présentent aucun risque de rejet.
Après avoir réparé la lésion méniscale, le Pr OLLIVIER et son équipe ont remplacé, grâce à la greffe de cartilage frais, 60% de la surface interne du fémur au niveau du genou.
« Le cartilage du tibia et le ménisque étaient relativement intacts. Plus de la moitié de l’articulation fémoro-tibiale interne était saine. C’est l’une des raisons pour lesquelles la greffe de cartilage nous est apparue comme la meilleure option possible.
L’opération a duré environ une heure. La greffe d’un si gros volume de cartilage frais, réalisée avec le concours de l’EFS et à l’aide du système de fabrication de prothèse d’Arthrex, est une première en France. Mais la technique est indiscutablement appelée à se développer. » (Pr OLLIVIER)
La patiente a pu reprendre un appui complet trois semaines après l’opération. Dans six mois environ, elle pourra envisager de reprendre des activités sportives. Trois autres patients dont de très jeunes adultes ont également pu récemment bénéficier de cette technique grâce à l’équipe de l’Institut du Mouvement et de l’Appareil Locomoteur.
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