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Oui, ce que nous mangeons influence notre risque d’AVC

Publié le :
20/08/2025 à 15:32

C’est un fait : la prévention de nombreuses pathologies passe par notre alimentation. Des messages sont largement diffusés en ce sens pour ce qui concerne les maladies cardiovasculaires, certains cancers ou encore le diabète de type 2. Ils s’appuient sur de larges études observationnelles basées sur les habitudes alimentaires. Une équipe de l’AP-HM est récemment allée plus loin, démontrant à l’échelon biologique individuel que notre régime alimentaire influe directement sur la stabilité des plaques d’athérome carotidiennes et le risque d’accident vasculaire cérébral (AVC).

La maladie athéromateuse carotidienne se caractérise par le dépôt de graisses sur les parois de la carotide. Progressivement, ces plaques d’athérome (athérosclérose) vont provoquer une sténose, c’est-à-dire un rétrécissement de l’artère qui va entraver le bon acheminement du sang. Les patients présentant une sténose très serrée sont généralement opérés de manière préventive pour éviter la survenue d’un AVC. Leurs plaques athéromateuses sont toutefois encore stables au moment de la chirurgie. Les patients qui viennent de faire un AVC et présentent une sténose serrée sont systématiquement opérés car leurs plaques, fortement déstabilisées, sont susceptibles de provoquer une récidive précoce d’AVC.

Quels sont les facteurs les plus déterminants dans le devenir des plaques d’athérome ? Qu’est-ce qui rend certaines plaques stables, tandis que d’autres sont susceptibles de rompre à tout instant ? Afin de l’étudier, le Dr Emilie Doche et le Pr Laurent Suissa (Unité neurovasculaire), le Pr Michel Bartoli (service de chirurgie vasculaire), le Pr Gabrielle Sarlon et le Dr Barbara Leclercq (service de médecine vasculaire) ont associé leur expertise au sein du Laboratoire C2VN. Leur étude visait à comparer les plaques de patients opérés soit de manière préventive (patients dits "froids" avec une sténose chronique), soit juste après la survenue d’un AVC (patients "chauds" présentant une plaque particulièrement instable).

Ils ont utilisé pour cela une méthodologie extrêmement innovante : la spectrométrie de masse couplée à la chromatographie liquide. C’est le Dr Leclercq, assistante du Pr Sarlon, qui a travaillé dans le cadre de son Master 2 de recherche à la préparation des séquestres athéromateux. Pour ce type d’analyse, il était en effet nécessaire de faire passer les plaques à l’état liquide, afin d’en extraire toutes les petites molécules. Réalisée par le Dr Doche et le Pr Suissa, l’analyse par spectrométrie de masse a permis d’identifier l’intégralité des molécules (métabolome) contenues dans les plaques de 72 patients opérés par le Pr Bartoli.

En comparant le métabolome des plaques stables (sans AVC) avec celui des plaques vulnérables (avec AVC), l’équipe a pu déterminer quelles molécules sont spécifiques aux unes et aux autres.

Les résultats ? Ils corroborent pour la première fois à un niveau biologique les grandes études épidémiologiques sur l’alimentation et la santé cardiovasculaire :

  • Le café (caféine et ses catabolites) ainsi que les biomarqueurs d'une alimentation riche en fruits et légumes semblent stabiliser les plaques d'athérome. Le café participerait à l’augmentation du bon cholestérol (HDL-cholestérol).
  • A l’inverse les dérivés de la vitamines B3 (niacine), provenant principalement des produits alimentaires ultra transformés, sont à l'origine de mécanismes inflammatoires qui rendent les plaques plus vulnérables.

Ces données renforcent les messages de prévention en apportant la preuve de leur pertinence : nos habitudes alimentaires se traduisent au niveau biologique en exerçant une influence directe qui peut être soit bénéfique avec une consommation régulière de fruits et légumes et modérée de café, soit délétère avec une nourriture industrielle insuffisamment variée et mal adaptée.

L’étude a fait l’objet d’une publication dans l’International Journal of Molecular Sciences . Elle ouvre de nombreuses perspectives, notamment pour affiner les recommandations en matière d’alimentation et de prévention, personnaliser les conseils mais aussi analyser l’adhérence des patients aux régimes préconisés. D’autres travaux de recherche sur cette thématique sont sur le point d’être lancés.