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Réorganisation régionale de la prise en charge du cancer de l’ovaire : l’AP-HM devient un acteur majeur

Publié le :
04/07/2025 à 14:36

Discussion avec le Pr Xavier CARCOPINO, Chef du service de Gynécologie obstétrique à l’Hôpital Nord

La prise en charge du cancer de l’ovaire va connaître cette année une réforme importante au niveau national, destinée à assurer aux patientes les meilleurs soins possibles. Elles seront en effet systématiquement orientées vers des centres agréés, dont les ressources matérielles et humaines permettent de proposer un parcours optimal.

La littérature scientifique montre que le pronostic de ces patientes est corrélé au volume d’activité du centre où elles sont accueillies. Autrement dit, un centre qui opère peu de cancers de l’ovaire a globalement des résultats moins bons qu’un centre habitué à ce type de prise en charge. L’ARS PACA a été la première de France à impulser ce changement d’organisation en désignant dans la région les 3 centres à même d’offrir aux patientes le plus de chances de guérison. L’Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille va occuper une place prépondérante dans le dispositif avec deux centres agréés : le service de chirurgie gynécologique de l’Hôpital Nord et celui de l’Hôpital de la Conception. A partir de septembre 2025, toutes les patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire devront donc être adressées soit à l’AP-HM dans l’un de ces deux services compétents (Nord et Conception), soit à l’Institut Paoli Calmettes.

« Ce nouveau fonctionnement change véritablement la donne pour les patientes. Le cancer de l’ovaire est une pathologie relativement rare mais grave, avec une mortalité d’environ 3000 décès pour 5000 cas chaque année. Il n’existe pas de test de dépistage du cancer de l’ovaire et très souvent la maladie va être diagnostiquée au stade 3, qui est déjà très avancé. Sa prise en charge nécessite non seulement des équipes multidisciplinaires compétentes, mais aussi des plateaux techniques complets. C’est la grande force des services de l’AP-HM qui offre, sur ses deux sites de Nord et de la Conception, tous les plateaux techniques et spécialités médicales nécessaires à une prise en charge optimale de ces patientes. »

La prise en charge chirurgicale est en effet lourde et complexe avec des interventions pouvant durer de 4 à 7 heures. La maladie évolue d’abord sans manifestation clinique notable et à l’apparition des premiers symptômes, le plus souvent un gonflement abdominal et des maux de ventre, elle a déjà progressé de manière importante.

« La tumeur qui se développe à la surface de l’ovaire va très vite disséminer dans le ventre et engendrer des nodules tumoraux sur le feuillet qui recouvre la cavité abdominale, à savoir le péritoine. Il est fréquent qu’il y ait alors des localisations multiples avec des nodules de carcinose pouvant envahir en partie le tube digestif, des métastases, des atteintes ganglionnaires. Le pronostic est alors intimement lié à la capacité à réaliser une chirurgie complète qui va permettre de retirer toute la tumeur et ne laisser par conséquent aucun nodule tumoral. »

Seuls des chirurgiens expérimentés seront en mesure de pratiquer ces différents types d’interventions : hystérectomie, annexectomie bilatérale, curages ganglionnaires pelviens et lombo aortiques, omentectomie (ablation du grand épiploon), appendicectomie et très souvent des gestes associés tels que des résections coliques, du grêle, des coupoles diaphragmatiques ou encore une ablation de la rate.

« Tout cela nécessite : un plateau technique nous permettant de collaborer avec nos collègues chirurgiens digestifs, une surveillance en réanimation sur les premiers jours post-opératoires, des anesthésistes habitués à ce type de prise en charge, de la radiologie et éventuellement de la radiologie interventionnelle, de l’oncologie médicale. La raison pour laquelle l’AP-HM a été choisie est que bien évidemment nos deux centres experts de chirurgie gynécologique, Nord et Conception, disposent de toutes ces ressources et compétences et présentent le niveau le plus élevé de sécurité. »

Afin d’anticiper cette réorganisation des soins, les équipes ont fourni en amont un travail considérable aux côtés de l’ARS. Une charte de prise en charge à destination des autres centres de la région a été élaborée, détaillant des critères diagnostics très précis afin que les cancers soient détectés au plus tôt et que les patientes soient aussi rapidement que possible adressées à l’AP-HM. Une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) régionale a en outre été instituée via la plateforme de collaboration médicale ROFIM. Elle réunit tous les experts régionaux du cancer de l’ovaire, qui peuvent ainsi décider collégialement de la prise en charge la plus pertinente pour chacun des cas présentés, selon les plus hauts standards de qualité.

Plusieurs pays européens ont déjà adopté ce fonctionnement. Il repose sur des données scientifiques solides qui montrent que les chances de survie dépendent significativement du lieu de prise en charge. Il est ainsi crucial que les indications soient bien posées dès le départ.

« La possibilité d’une chirurgie de résection complète est déterminée par une cœlioscopie diagnostique qui peut être pratiquée par les centres non agrées. Idéalement, cette chirurgie de résection doit être réalisée dès le départ. Si ce n’est pas possible, les patientes vont suivre une chimiothérapie en première intention, dans l’espoir de faire diminuer le volume tumoral pour pouvoir les opérer dans un second temps. D’où l’importance de notre RCP régionale où tous les cas de cancers de l’ovaire, sans exception, sont présentés et analysés pour une prise de décision thérapeutique optimale. »

Si la majorité des cancers de l’ovaire se déclarent chez des femmes ménopausées, il arrive qu’ils frappent également des jeunes femmes. Un autre atout majeur de l’AP-HM est de disposer, à l’Hôpital de la Conception, d’un Laboratoire de biologie de la reproduction avec une plateforme d’onco-fertilité .

« Si la chirurgie reste la base de la prise en charge du cancer de l’ovaire, il convient enfin de souligner les réels progrès réalisés ces dernières années en matière de traitements médicamenteux et en particulier de thérapies ciblées, qui donnent de l’espoir aux patientes. A travers nos publications scientifiques et l’inclusion de patientes dans des essais thérapeutiques nationaux, nous participons activement à la recherche. »

Les chirurgiens référents :

Dr Antoine NETTER, Dr Laurence PIECHON et Pr Xavier Carcopino (Hôpital Nord)

Dr Sara DJEMOUAI CLEMENCON, Dr Laura SABIANI, Pr Aubert AGOSTINI (Hôpital de la Conception)

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