La thalassémie
Syndrome beta-thalassémique
La bêta-thalassémie est une maladie autosomique récessive rare en France. Il s’agit d’une anémie secondaire à un défaut de production de la chaine bêta de l’hémoglobine. Le diagnostic est formellement établi sur des données d’étude biochimique de l’hémoglobine sans véritable diagnostic différentiel. En fonction de la gravité, il existe deux formes de maladies : une forme dite majeure et une forme de sévérité moindre dite intermédiaire.
Dans la forme majeure, le patient nécessite un régime transfusionnel systématique au long cours institué avant l’âge de 4 ans car l’anémie (jugée sur la tolérance clinique et un taux d’Hb < 7-8 gr/dl) est très sévère. La dépendance transfusionnelle est définie comme un minimum de 8 séances transfusionnelles/an.
Dans la forme intermédiaire, le patient présente une anémie moins sévère ne nécessitant peu ou pas de transfusions. Le terme de thalassémie non dépendante des transfusions est également utilisé.
Le registre national des Thalassémies a été développé depuis 2006 par le Centre de Référence des Thalassémie auquel il est intégré. En juin 2017, il a enregistré les données de 653 patients atteints de forme majeure ou intermédiaire de bêta-thalassémie. Les 2/3 sont atteints de forme majeure, 72 sont porteurs d’une hétérozygotie composite HbE/bêta-thalassémie et 114 ont reçu une greffe de cellules souches hématopoïétiques. L’âge médian des patients thalassémiques majeurs est de 20 ans. La principale complication liée à la surcharge en fer chez ces patients est l’hypogonadisme présente chez 50% des patients âgés de plus de 14 ans. L’insuffisance cardiaque et l’hypothyroïdie sont retrouvés chez 12.5% et 11% des patients respectivement. Les patients thalassémiques intermédiaires ont un âge médian de 26 ans et ils présentent moins de complications liées à la surcharge en fer. Seulement 16% de patients présentent un hypogonadisme et environ 5% une hypothyroïdie.
Au cours des 40 dernières années, des progrès thérapeutiques réguliers ont transformé le pronostic de cette anémie constitutionnelle : de spontanément létale au cours des premières années de vie, elle est devenue une maladie chronique où l’espérance de vie actuelle des patients traités par l’association de transfusions systématiques et d’une chélation du fer régulière, est évaluée à plus de 50 ans. Les progrès de ce traitement dit conventionnel ont été la diversification des traitements chélateurs du fer et l’introduction de l’IRM cardiaque dans le dépistage de la surcharge cardiaque à un stade pré-symptomatique. La greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) est la seule thérapeutique curatrice actuelle et est systématiquement proposée chez l’enfant et l’adolescent disposant d’un donneur HLA-identique intra-familial. Plusieurs programmes de thérapie génique sont actuellement en cours d’évaluation.
Syndrome Alpha-thalassémique
Les alpha-thalassémies sont transmises sur le mode autosomique récessif, leur transmission étant plus complexe que celle des bêta-thalassémies, car il existe quatre gènes alpha-globine. Elles résultent de délétions (le plus souvent) ou de mutations ponctuelles (plus rarement) d’un ou plusieurs des quatre gènes alpha-globine. Les formes symptomatiques d’alpha-thalassémies sont rares en France et concernent principalement des patients d’origine asiatique. La délétion ou l’inactivation d’un seul gène (alpha-thalassémie silencieuse) ou de deux gènes alpha (alpha-thalassémie mineure) ne s’accompagne pas d’anémie et n’a aucune traduction clinique. La délétion des quatre gènes alpha (hydrops fetalis à Hb Bart’s) entraîne une anémie intense dès la période fœtale. Elle se traduit par une anasarque fœto-placentaire conduisant le plus souvent au décès in utero ou juste après la naissance. L’hémoglobinose H (délétion ou inactivation de trois gènes alpha) est caractérisée par une anémie hémolytique chronique, microcytaire, hypochrome et régénérative. L’anémie est le plus souvent modérée, permettant aux patients une vie proche de la normale. Les besoins transfusionnels sont absents ou ponctuels, les transfusions sanguines au long cours sont exceptionnellement indiquées. L’étude biochimique de l’Hb met en évidence la présence d’HbH, constituée de quatre chaînes bêta-globine. Les complications de l’hémoglobinose H sont celles des hémolyses constitutionnelles (lithiases biliaires, hypersplénisme…). Des poussées d’hémolyse aiguë exacerbant l’anémie surviennent en particulier lors des épisodes infectieux ou de la prise de médicaments oxydants.