Prendre soin des reins après la réa
Du fait de leur état hémodynamique précaire, avec une baisse prolongée de la tension artérielle, il est fréquent que les patients admis en réanimation présentent une aggravation brutale de leur fonction rénale. Cette insuffisance rénale aiguë, le plus souvent due à de la nécrose tubulaire, est associée à un pronostic nettement plus réservé lorsqu’elle survient chez les malades de réanimation. Les patients qui évoluent favorablement lors de leur séjour en réanimation vont cependant, en majorité, totalement récupérer leur fonction rénale. Celle-ci s’étant normalisée, ces patients ne bénéficient généralement d’aucun suivi néphrologique lorsqu’ils sortent de réanimation.
« Pour autant, un épisode d’insuffisance rénale aiguë n’est pas anodin. Même s’ils ont récupéré à court terme, il a été établi depuis maintenant une dizaine d’années qu’à long terme, ces patients sont à risque de développer une maladie rénale chronique. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place au centre de néphrologie de la Conception, en collaboration avec l’ensemble des réanimations de l’AP-HM, une consultation dédiée à ces patients. » (Dr Mickaël Bobot)
Qu’ils aient eu besoin de dialyser ou non, les malades ayant développé une insuffisance rénale sévère lors de leur séjour en réanimation sont désormais revus de façon systématique 3 mois plus tard en consultation au centre de néphrologie et transplantation rénale du Pr Philippe Brunet. Un bilan standardisé est effectué pour détecter d’éventuelles altérations de la fonction rénale ou d’anomalies comme des protéines ou du sang dans les urines, ou encore de l’hypertension artérielle. L’objectif est de pouvoir, de façon précoce, détecter la survenue d’une maladie rénale chronique séquellaire et prévenir son aggravation grâce à des traitements néphroprotecteurs et des mesures hygiéno-diététiques adaptées * .
« Sur les 50 premiers patients de notre cohorte, 58 % d’entre eux présentaient une maladie rénale chronique à 3 mois. Chez 51 %, la consultation a permis que ces patients bénéficient de la prescription d’un traitement néphroprotecteur indiqué à ce stade de développement de la maladie. Le suivi personnalisé que nous mettons en place par la suite dépend de l’évolution de la maladie et des facteurs de risques tels que le diabète, l’hypertension ou l’âge. Les bilans sont envoyés aux équipes de réanimation et transmis aux médecins traitants. »
À terme, cette filière de suivi permettra également de savoir mieux identifier les patients dont la fonction rénale est susceptible de se dégrader après une insuffisance rénale aiguë et ceux qui ne présentent au contraire que peu de risques.
« Ce type de suivi spécialisé et systématique, impliquant une collaboration étroite avec les réanimateurs, est encore très peu proposé dans d’autres centres, que ce soit en France ou dans le monde. Un autre intérêt de la consultation est qu’elle a aussi permis de dépister des malades qui avaient une insuffisance rénale chronique préexistante à leur séjour en réanimation. Cela concernait 24 % des patients, presque 1 malade sur 4. »
* Par exemple : Activité physique adaptée au moins 30 minutes par jour, limitation des apports en sel et en protéines, en particulier animales. Contrôle de la glycémie et de la tension artérielle.