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La CUMP 13 en soutien aux victimes des incendies

Publié le :
14/08/2025 à 14:27

Nous avons tous vu le ciel s’assombrir, prendre une étrange teinte orangée, comme une ambiance de fin du monde. Nous avons tous senti l’odeur de brûlé, vu les panaches de fumée et les cendres entraînées par le vent. Bon gré mal gré nous avons continué à vivre, faisant comme si de rien n’était. Mais certains ont aussi vu les flammes. Le brasier menacer leur quartier, s’approcher dangereusement de leur habitation. Que ces personnes aient tenté de lutter avec les moyens du bord, d’aider leurs proches ou leurs voisins, qu’elles se soient confinées ou aient finalement dû être évacuées, elles ont vécu une expérience éminemment traumatisante : l’irruption du désastre dans leur univers le plus familier, dans leur quotidien. Et certains ont tout perdu. Leur maison, leurs affaires et effets personnels dévorés par les flammes, leurs souvenirs réduits en cendres. Dans ces situations c’est la vie elle-même qui vacille, perd tous ses ancrages et ses repères. En complément des actions aussi primordiales que périlleuses des pompiers, la Cellule d’Urgence Médico-Psychologique de l’AP-HM a donc été mobilisée au plus près du sinistre afin de venir en aide aux victimes. Entité du SAMU 13, la CUMP 13 fonctionne avec une équipe de membres permanents et un réseau d’agents hospitaliers volontaires formés à la prise en charge du stress post-traumatique. Prévenir l’effondrement des êtres qui ont vécu la catastrophe, voilà le rôle crucial des CUMP. Répondre à l’urgence médico-psychologique, repérer les personnes les plus à risque, s’assurer qu’elles pourront bénéficier d’un suivi.

Mardi 29 juillet 2025 à 19H, le feu continuant à progresser et atteignant des dimensions plus qu’inquiétantes, l’intervention de la CUMP a officiellement été déclenchée après plusieurs réunions de crise associant le SAMU et les instances de l’AP-HM. A 20H, une petite équipe de membres permanents de la CUMP s’est rendue au gymnase Rabelais, en face de l’Estaque, où des habitants commençaient à être évacués. Étaient présents Marie-Pierre Valet, Secrétaire médicale, Dominique Lemoine, infirmière, Marie Pittaco, pédiatre, ainsi que Victor Boyer, interne.

La CUMP 13 en soutien aux victimes des incendies

« De 21H jusqu’à 2H du matin, nous avons accueilli les personnes évacuées afin qu’elles puissent partager avec nous leur ressenti. Toute La gamme des émotions susceptibles de nous envahir dans ce type de situations : tristesse, anxiété, sidération, colère... Des larmes aussi. C’était d’autant plus touchant qu’il y avait beaucoup de personnes âgées avec leurs animaux de compagnie. Nous les avons écoutées et leur avons signifié que nous étions dorénavant à leur disposition, avec dans un premier temps une permanence qui allait se mettre en place au centre social Rabelais puis, s’ils le souhaitaient, un suivi au pôle Psychiatrie Centre. Nous leur avons aussi délivré des attestations de prise en charge, qui n’ont pas seulement un intérêt administratif, mais sont aussi une reconnaissance du traumatisme subi. » (Marie-Pierre Valet)

Ce temps d’échanges a aussi été l’occasion pour l’équipe d’expliquer aux victimes que leur angoisse, leur sentiment de vulnérabilité et de détresse, leur désarroi étaient parfaitement normaux et qu’elles ne devaient pas se sentir coupables de les ressentir. Une écoute attentive, dénuée de toute forme de jugement, apporte un premier apaisement, de même que l’assurance que l’on ne sera pas tout seul pour traverser l’épreuve qui vient de nous tomber dessus.

« Et il ne faut pas négliger la respiration, qui est aussi une arme redoutable dans ces situations, pour reprendre la maîtrise de son corps, retrouver un rythme, un ancrage. »

Mercredi 30 juillet au matin, malgré une très courte nuit, toute l’équipe était sur le pont et en particulier Marie-Pierre, qui avait alors pour mission de mobiliser les volontaires de l’AP-HM, mais aussi des hôpitaux partenaires (Valvert, Edouard Toulouse, Montperrin, Arles et Martigues). La CUMP n’est en effet constituée que de 6 permanentes, et les besoins humains sont nettement supérieurs dans le cas d’une catastrophe collective de cette ampleur. Mais en pleine période estivale, avec des effectifs réduits au sein des établissements, la tâche s’est avérée particulièrement ardue.

« Et pourtant, à force d’appeler, d’appeler, d’appeler, nous sommes parvenues à former des équipes de 4 à 6 personnes pour non seulement assurer la permanence au centre social Rabelais, mais aussi effectuer des maraudes dans les rues les plus impactées par l’incendie. Chaque volontaire qui me répondait "oui" était une étoile qui illuminait notre journée ! Certains sont venus sur leurs congés et vraiment, je crois que l’on peut saluer la conscience professionnelle et l’humanité de tous ces volontaires. Ensuite, c’est toute une logistique et un travail de coordination à mettre en place pour que les actions soient parfaitement cadrées. Le fait de connaître déjà les lieux et les enjeux est pour cela primordial, d’où l’intérêt de se rendre sur place dès le déclenchement du processus. »

Lydie Toche, cadre formatrice à l’IFSI Sud (Hôpital Sainte-Marguerite), a fait partie de ces 47 volontaires qui ont tout fait pour participer au déploiement. Elle est parvenue à se libérer 10 jours de suite (la mobilisation a duré 15 jours au total). C’était pour elle la toute première intervention CUMP mais son parcours de 20 années en tant qu’infirmière puis cadre dans différents services de réanimation, SMUR, urgences et bloc opératoire font d’elle une personne parfaitement capable et rigoureuse, à même de s’adapter à différentes situations et contextes. A ce titre elle a participé aussi bien à l’accueil sur le centre social qu’aux maraudes organisées dans les quartiers.

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« C’était une expérience très riche de rencontres, déjà avec d’autres professionnels de l’AP-HM ou des établissements partenaires. Avec les maraudes, nous avons vraiment pu quadriller le secteur en travaillant à la fois avec des bénévoles de la ville, des médiateurs, les marins pompiers, la police municipale et les membres de l’AVAD. Dans les rues, les habitants chez qui nous allions sonner ou que nous croisions était toujours reconnaissants et touchés que l’on soit venu à leur rencontre. Au centre social, les victimes avaient également tout à disposition pour réaliser les premières démarches juridico-administratives, se reposer, manger, recevoir un soutien psychologique ou passer une consultation médicale. Pour chaque personne vue, une fiche SIVIC était remplie avec la description de la situation. Au moindre signe de détresse psychologique, nous le signalions sur la fiche afin que la cellule CUMP permanente puisse rappeler rapidement la personne en question. » (Lydie Toche)

Ces fiches SIVIC sont un dispositif mis en place par le ministère de la santé et l’ARS depuis les attentats du 13 novembre 2015. Elles permettent de répertorier les victimes d’une catastrophe collective, de savoir qui s’est manifesté, qui doit être recherché, de conserver une trace de la prise en charge. Pour l’équipe de la CUMP, elles servent également à organiser le suivi des personnes repérées par les volontaires comme pouvant avoir besoin de soins spécifiques. En tant que secrétaire de la CUMP, Marie-Pierre Valet collecte l’ensemble des fiches et les saisit ensuite dans le logiciel SIVIC mis en place par le Ministère de la Santé. Au 24 juillet, elle en avait déjà enregistré plus de 350 (350 prises en charge ce qui représente, avec les personnes revenues plusieurs fois, environ 250 personnes).

Nous avons tous vu des images des flammes et des pompiers à pied d’œuvre pour tenter de les contenir. Comme toujours dans ce type d’événement dramatique, l’équipe de la CUMP s’est mobilisée elle aussi pour éviter que l’expérience traumatique ne cause, cette fois intérieurement, des dégâts supplémentaires. Merci à elle et à tous les volontaires.

Cet été, soyons tous vigilants face aux risques d’incendie.