Entrer au bloc, monter sur le ring

Cogner, encaisser, tomber, se relever, cogner encore. Audrey Kerouche s’entraîne tous les jours, mue par une volonté à toute épreuve, la volonté de ne jamais se laisser abattre. Dans le gymnase Fonscolombes, avec les autres membres de la Team Sorel et Yvan Sorel, son entraîneur et compagnon, elle apprend à devenir toujours plus offensive, toujours plus résistante.

Cogner, encaisser, faire face à l’adversité, avancer. Le combat qui se livre n’est pas tant contre un opposant identifié, il s’agit plutôt d’affronter ses propres limites, de dépasser ses faiblesses pour faire honneur à son sport, à son entraîneur et, avant tout, à soi-même. 
  
« Avant chaque combat je suis très concentrée, je n’ai plus aucune pensée néfaste, mon téléphone est coupé. Avant chaque entrée sur le ring, j’ai toujours une pensée pour les personnes qui me sont chères. Et je pense à celui qui m’a tout appris, à mon coach, à tout ce temps qu’il a passé à m’entraîner, me conseiller. C’est un sport individuel mais avec le coach, nous formons une équipe. C’est le plus beau des remerciements que de lui donner la victoire et j’ai toujours envie de me donner à fond pour atteindre cet objectif » 

En quelques années, Audrey est devenue une combattante professionnelle reconnue. Elle a remporté la coupe de France de karaté mixte, a été la première marseillaise à obtenir un titre de pancrace et s’est classée parmi les meilleures en MMA (Mixed Martial Arts) : 5ème en France toutes catégories, 1ère ex-aequo chez les moins de 52kg. Difficile d’imaginer qu’en dehors des rings ou de la cage de MMA, elle exerce la profession d’infirmière ! C’est pourtant bien le cas : depuis fin 2011 elle travaille en tant qu’infirmière au bloc central de l’Hôpital Nord et suit depuis octobre 2018 une formation IBODE à l’IFSI Houphouët Boigny. En tenue de combat ou en blouse blanche, son attitude est identique, celle d’une battante :

« Infirmière de bloc, j’ai la même adrénaline que lorsque je monte sur un ring. On vous annonce une urgence, vous ne savez pas ce qui vous attend mais vous foncez car votre but c’est d’aider l’autre, quoi qu’il arrive. C’est de tout donner pour arriver au résultat attendu »

La vie d’infirmière, un sport de combat ? Pas tout à fait car il y a aussi cette dimension humaine si importante, cette qualité de présence dans le rapport à l’autre qui doit permettre en quelques mots, quelques gestes, de rassurer un patient, de le soutenir.

« C’est un métier basé sur le relationnel et bien-sûr c’est ce qui fait notre force, c’est nous qui donnons la main au patient avant une intervention. C’est ce qui me plait, aider l’autre, être là pour lui. C’est difficile de décrire ce que l’on peut ressentir il faudrait le vivre pour comprendre. Travailler sous pression, être dans le feu de l'action, aider à sauver des vies, consoler, réconforter, c’est ça être infirmière »

Cogner, encaisser, tomber, se relever… et prendre soin ! Dans tous les cas il y a pour Audrey un don de soi. Ces deux facettes de son existence impliquent l’une comme l’autre, pour elle, un engagement total.

Cet engagement anime aussi son entraîneur et compagnon, Yvan Sorel. Le club qu’il a créé à 18 ans et porte à bout de bras fonctionne sans aucune subvention, mais compte aujourd’hui 250 élèves dont 9 professionnels. « Le club, c’est une famille » explique-t-il :


« Nous sommes dans le quartier le plus pauvre de Marseille, mais c’est le plus riche en termes de qualités humaines »



Lorsqu’il est invité par Les Cuistots du Cœur à un événement pour les enfants malades, il est touché et décide immédiatement de s’investir davantage aux côtés de l’association, dont il est maintenant le parrain. Yvan et Audrey ont ce précieux pouvoir de donner du courage à celles et ceux qu’ils côtoient, en partageant avec eux, enfants, adultes, patients ou élèves, leur combativité :

« Ne jamais lâcher. J’ai gagné des combats et j’en ai aussi perdu et je n’ai jamais arrêté j’ai toujours persévéré. La vie c’est un peu la même chose on traverse différentes étapes, on prend différentes routes et peu importent les résultats on continue, on s’entraîne davantage et on fonce vers nos objectifs »



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