Utilité du lipofilling contre le handicap du visage des patientes atteintes de sclérodermie

L’atteinte du visage est fréquente dans la Sclérodermie systémique (ScS), une maladie auto-immune rare prise en charge par le Centre de compétences adulte pour les maladies auto-immunes et auto-inflammatoires rares (Pr Brigitte Granel). La fibrose cutanée entraine une perte de souplesse de la peau, avec en conséquence une perte de la mimique faciale et un rétrécissement péri-buccal qui limite l’ouverture buccale. L’atteinte du visage a un impact esthétique et fonctionnel dans le quotidien des patients. Il n’y a pas de traitement médicamenteux ou de physiothérapie efficace.

À Marseille, l’équipe de chirurgie plastique et réparatrice (Pr Dominique Casanova) a développé une technique de micro-lipofilling facial qui consiste à utiliser le tissu adipeux du patient, à le filtrer et l’injecter autour de la bouche et du visage, dans le même temps opératoire (durée environ 1h30). La collaboration entre chirurgiens plasticiens, médecins internistes et le laboratoire de thérapie cellulaire a permis de montrer dès 2016 la faisabilité et le bénéfice de cette thérapie sur le handicap facial au cours de la ScS (Liens Publi Sautereau N et al_Plast Reconstr Surg Glob Open_2016 ; ClinicalTrial_NCT02206672). Le bénéfice obtenu de cette technique proposée notamment à Marseille était cependant limité dans le temps, avec une perte de l’effet volumateur et esthétique sur le visage au bout d’environ 3 à 6 mois, en lien avec la résorption du tissu adipeux, nécessitant des interventions répétées et rapprochées. 

Pour tâcher d’augmenter la longévité du micro-lipofilling facial, l’équipe a testé l’ajout de Plasma Riche en Plaquettes (PRP) prélevé chez le patient lui-même. La thérapie combinée de greffe adipocytaire avec des dérivés plaquettaires s’inscrit dans la pratique courante en chirurgie régénérative. Les auteurs viennent de publier leurs résultats sur la sécurité et l’efficacité de cette combinaison dans le cadre de leur protocole de prise en charge à Marseille. Ce protocole consistait en des injections sous anesthésie générale, d’un mélange de micro-graisse et de PRP, en proportion 70%/30%. Le critère principal de l’étude était l’évolution du score du handicap du visage, le « Mouth Handicap In Systemic Sclerosis » (MHISS) à 6 mois de l’injection du micro-lipofilling facial enrichi en PRP

Treize patientes âgées de 53,2 ans en moyenne (±14,3) ont été incluses sur la base d’un score MHISS supérieur ou égal à 20 (valeur 0 = aucun handicap, 48 = handicap maximal). Le score MHISS moyen à l’inclusion était de 29,5 (±8,7) et a significativement diminué jusqu’à 22,5 (±7,8) à 6 mois, témoignant d’une amélioration du handicap. La tolérance de la procédure était bonne. 
Les résultats ont été comparés à ceux obtenus dans l’étude publiée en 2016, auprès des 14 patientes ayant reçu des injections de micro-lipofilling non enrichi, selon le même protocole et la même indication. L’enrichissement en PRP ne semble pas permettre d’obtenir de meilleurs résultats sur la fibrose cutanée du visage, l’ouverture buccale, le syndrome sec et la douleur faciale.
 
Cette analyse confirme ainsi la faisabilité et l’intérêt du lipofilling pour lutter contre le handicap du visage des patientes souffrant de ScS. Cependant, de futures études mettant  en parallèle ces deux procédures sont attendues pour déterminer si le PRP présente un supplément d’intérêt par rapport au lipofilling seul, surtout à long terme. 

 

  • Assessing the effect of PRP addition to facial micro-lipofilling for patients suffering from Scleroderma: A prospective routine care analysis

Effet de l’enrichissement du micro-lipofilling facial par du Plasma Riche en Plaquettes dans la pathologie scle ́ rodermique : analyse prospective d’une pratique de routine

par Abellan-Lopez M, Philandrianos C, Daumas A, Velier M, Arcani R, Jouve E, Jaloux C, Bertrand B, Magalon J, Dignat-George F, Granel B, Casanova D, Sabatier F. Ann Chir Plast Esthet. 2022 Aug 17;S0294-1260(22)00118-2. 

Lien Article 

 
Figure 1 (tirée de l’article) : schéma montrant les zones d’injection de la graisse et du PRP (Jaune : injection sous-cutanée ; Rose : injection sous-muqueuse)
 

Figure 2 (tirée de l’article) : Photographies avant (A, C) et à 6 mois de la procédure (B et D)

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