Impact thérapeutique de la classification des tumeurs hypophysaires
Le Centre de référence des Maladies rares d'origine Hypophysaire HYPO (Pr Thierry Brue) vient de publier une première étude sur l'impact clinique en vie réelle de la classification clinicopathologique des tumeurs hypophysaires. Cet article fait suite à la publication sur le rôle de IGSF1 dans l’hypothyroïdie congénitale centrale, dans la même revue internationale Eur J Endocrinol (lien Actualité Mutations IGSF1 03 Janvier 2023). Il illustre une nouvelle collaboration interne à l’AP-HM, avec le CHU de Montpellier, qui inclue services de soins et d’analyses.
La classification clinico-pathologique à 5 niveaux de Trouillas se base sur le caractère invasif ou non de la tumeur, son activité proliférative et l’expression de p53 (gène suppresseur de tumeur). Cette classification a-t-elle une une valeur prédictive sur l’évolution de la tumeur ? Influence-t-elle la prise en charge thérapeutique et les traitements ? Pour le déterminer, les auteurs ont réalisé une étude rétrospective sur les caractéristiques médicales d’une cohorte indépendante de 607 patients pris en charge au Centre Hypo de Marseille. Ils avaient eu une première opération pour une tumeur hypophysaire entre 2008 et 2018, puis avaient été suivis par le centre pendant au moins 12 mois.
L’évaluation des tumeurs hypophysaires selon la classification de Trouillas a permis de distinguer les tumeurs non invasives avec ou sans activité proliférative (grade 1b ou 1a), les tumeurs invasives avec ou sans activité proliférative (grade 2b ou 2a). Il n’y a pas eu de carcinome hypophysaire (grade 3). Le suivi moyen a été d’environ 4 ans.
La progression et/ou récurrence* de la tumeur a touché environ 1/5 des patients, avec 5 fois plus de risques pour les patients grade 2b (invasif + prolifératif) comparé au grade 1a (non invasif, non prolifératif).
Ces catégories étaient des prédicteurs de cette progression et/ou récurrence.
En traitement secondaire, la radiothérapie conventionnelle permettait de contrôler la croissance de la tumeur dans tous les cas, la radiochirurgie gamma-knife dans ~92% des cas, ceci indépendamment du grade.
Cependant, les tumeurs prolifératives exposaient le patient à un risque plus élevé d'avoir au moins 3 thérapies en plus de la première chirurgie (voir Table).
* Caractérisées par la progression et/ou l’hypersecrétion de la tumeur hypophysaire
- Real-life clinical impact of a five-tiered classification of pituitary tumors par Sahakian N, Appay R, Resseguier N, Graillon T, Piazzola C, Laure C, Figarella-Branger D, Régis J, Castinetti F, Brue T, Dufour H, Cuny T. Eur J Endocrinol. 2022 Nov 29;187(6):893-904. doi: 10.1530/EJE-22-0812. Print 2022 Dec 1. Lien PubMed
Table (Tirée de la table 3 de l’article). Séquences thérapeutiques après la première chirurgie hypophysaire. GKRS : Radiochirurgie gamma-knife, c’est-à-dire le traitement par rayons gamma, sans ouverture du crâne.
Other therapies : Autres traitements, qui peuvent inclure des inhibiteurs de la stéroïdogenèse, des ligands des récepteurs de la somatostatine, des agonistes dopaminergiques, seuls ou en combinaison.
PC au-dessus de la flèche : indique que le carcinome hypophysaire a été diagnostiqué à ce moment.
